Pagliacci (Paillasse) et Cavalleria rusticana (chevalerie paysanne) sont deux exemples classiques d’opéras véristes, de ceux qui racontent des histoires soi-disant réalistes sur la vie de personnes ordinaires. Dans ces deux opéras, les relations entre les personnages sont menacées à cause de rivalités suscitées par le tempérament bouillant du Sud. Alors que Pagliacci est alimenté par la tension entre la vie quotidienne et le monde esthétique de la scène, Cavalleria rusticana juxtapose une passion effrénée à une foi profonde. Le metteur en scène Robert Carsen bouscule la tradition en commençant par Pagliacci. Carsen joue à un jeu magistral de théâtre dans le théâtre, remettant en question la nature de la réalité. Les émotions que nous voyons sur scène sont-elles jouées ou authentiques ? Et dans quelle mesure nous projetons-nous dans les personnages ? Lorsque les masques tombent, la vérité devient théâtre et le théâtre devient vérité. Le chœur se trouve quelque part entre les deux, nous guidant à travers les mondes de la réalité et de la fiction. Comme l'a dit le dramaturge Luigi Pirandello : « Le théâtre est en nous ; nous sommes le théâtre » . La vision de Carsen évite les clichés : pas de personnages de commedia dell'arte dans ce Pagliacci, ni de couleur locale sicilienne dans son Cavalleria rusticana.